vendredi 10 septembre 2010

La malédiction de Dorian Gray...

Le portrait de Dorian Gray de Oscar Wilde et son adaptation cinématographique de 2009, Dorian Gray de Oliver Parker.

LE LIVRE.


Editions Folio Classique, 04/1997, 330 pages.

Résumé: Dorian Gray, jeune homme de la haute société, héritier d’une fortune colossale, est le modèle favori d’un célèbre artiste peintre, Basil Hallward qui l’idolâtre et l’aime profondément. Ce dernier va créer un magnifique portrait de son protégé. Dorian Gray prend alors conscience que la jeunesse n’est pas éternelle. Le tableau restera éternellement beau et lisse alors qu’il vieillira de jour en jour. Il énonce alors un vœux: le portrait vieillira à sa place, tandis que le jeune homme restera éternellement jeune et beau. L’influence de lord Henry, charismatique philosophe qui est un fervent prédicateur de l’hédonisme, va mener le jeune Dorian Gray à connaître une vie influencée par ses plaisirs et ses pulsions. Jusqu’au jour où ses pêchés déforment son portrait et le gangrènent…

Mon avis: je m’étais promis de le lire depuis longtemps, s’agissant d’un classique fort apprécié du public, et je n’ai pas hésité une seconde à m’y plonger et je dois admettre que j’aurais du le faire bien plus tôt. Ce livre est un chef d’œuvre.

Comment ne pas résister à cette ambiance gothique qui se dégagent des pages, à l’atmosphère subtilement fantastique, aux intonations enivrantes de Lord Henry, à la passion dérangeante et dévorante qui s’éprend de Dorian Gray? Ce roman est une éloge à la vie dans tout ce qu’elle a de plus terrible. Succomber à ses tentations, c’est tomber dans les ténèbres. Dorian Gray bascule sans crier gare du côté de la lumière vers les ombres empoisonnées du pêché. Lord Henry, sorte de gourou charismatique de l’hédonisme, qui prétend que la vie ne peut être pleinement vécue que lorsqu’on est jeune et beau, va entraîner le chaste Dorian Gray vers les noires demeures de la corruption morale. La flamme de la passion et de l’ivresse brûle en lui et le décime peu à peu. Son portrait va alors se dégrader à une vitesse effrayante. Ce qui, au début, amuse le jeune homme, va très vite tourner à la psychose et à la déchéance. Jusqu’à cette superbe scène finale où la malédiction prend fin.

Dorian Gray est un personnage fascinant. C’est la transformation qui s’opère en lui qui est saisissante. Enfantin, pur et brillant, gentil et doté de magnifiques sentiments au départ, il va peu à peu décliner dans la cruauté, le mépris, la lâcheté et l’hypocrisie. La métamorphose est palpable et nous assistons, impuissants mais pleins d’une étrange fascination, à cette descente aux Enfers, à l’image de cette famille d’auteurs (majoritairement français) de la fin du 19ème surnommés « les décadents » dont fait partie l’irlandais Oscar Wilde.

En parlant du décadentisme, on pourrait s’attendre à voir dans ce roman un étalage des pêchés propres à choquer le lecteur. Il n’en est rien. Il est d’ailleurs étonnant de constater que tout est suggéré. Aucune description scabreuse ne vient ébranler le récit. La période où Dorian Gray s’adonne aux plaisirs les plus infâmes et sombre dans la déchéance morale est survolée par l’auteur et ne fait qu’agiter notre imagination, sans pour autant détailler le propos. Ce choix est d’autant plus terrible (et rusé) qu’il nous donne à imaginer des scènes terrifiantes et hautement sordides. Cet épisode (crucial) de la vie de Dorian Gray est subtilement passé sous silence et est raconté et dévoilé par les voix d’autres personnages, notamment par les gens de la Haute. Les ragots sont bels et bien fondés. Dès lors, Dorian Gray devient un émissaire du Diable aux yeux de tous, tout ce qu‘il touche sombre dans le néant, en même temps qu’il continue à exercer une attirance hypnotique.

Une autre dimension se dégage de ce roman, celle de la relation de l’Art avec l’artiste et son modèle. L’Art possède t-il une âme qui lui est propre? Se peut-il que la Vie se mêle à l’Art? Ou l’Art à la Vie? Autant de questions fascinantes qui ne manqueront pas de vous ébranler l’esprit.

Ce livre est un chef d’œuvre gothique que je relirai très certainement car sa lecture fut un vrai moment de plaisir et de révélation: Oscar Wilde est un génie. Ne passez pas à côté d’un tel roman, au risque de le regretter.

CHEF D’ŒUVRE!

LE FILM.



De Oliver Parker, 2009, avec Ben Barnes, Colin Firth et Ben Chaplin.

Mon avis: Un peu déçu. En effet, l’intrigue concoctée par Oscar Wilde est ici très largement remaniée, ce qui gâche considérablement certains points du livre. Cela va du détail insignifiant à l’action la plus déterminante. C’est dommage que le réalisateur ne soit pas resté fidèle au roman. Tout d’abord, le Dorian Gray interprété par Ben Barnes est trop placide et calme, on ne ressent pas la passion qui le parcourt ainsi que le frisson du pêché. Il est plutôt linéaire dans son jeu, ce qui ne donne pas accès à la profondeur psychologique du personnage du roman. Ici, Ben Barnes se contente de sourire plus ou moins et d’essayer de donner une consistance à son personnage. On ne perçoit pas de manière brutale et irrémédiable le changement moral de Dorian Gray. Le film laisse donc un protagoniste plutôt fade et gentillet, quoique bien cruel par moment, mais cela n’est guère effrayant. Si Dorian Gray n’est pas très égal à son original, Lord Henry est parfait. Joué par Colin Firth, on ne peut concevoir un meilleur philosophe hédoniste à l’écran. Son jeu est juste et colle parfaitement à l’idée que je me suis faite du lord Henry du roman. Nonchalant, provocateur, charismatique et envoûtant. Basil Hallward est également bien ressenti par son interprète, Ben Chaplin.

Là où le livre se tait, le film le montre. En effet, la réussite de ce film réside dans sa mise en scène et ses moments esthétiques. De très belles séquences de bals masqués lubriques ou encore de bars à opium exotiques. Les frasques de Dorian Gray sont illustrées dans le film et correspondent aux images qui m’ont traversé lors de la lecture du roman. Sado-masochisme, tortures, mélangisme, prostitution… Cet aspect du film est réussi et mérite toute mon attention car le roman n’en fait que mention sans en approfondir les faits. Ces séquences sont travaillées au niveau du décor et de l’atmosphère qui s’en dégage. On retrouve notamment une facette très sordide du Londres du 19ème, avec ses ruelles embrumées et couvertes de misère, ses lupanars malsains et sa criminalité exacerbée. A l’opposée, on s’extasie devant la splendeur des salons aristocratiques et l’élégance de la maison de Dorian Gray. Cet exotisme d’une époque révolue est délicieux à regarder.

En somme, c’est un film divertissant mais qui est décevant à cause du trop grand remaniement de l’intrigue (de ses ajouts et de ses retraits). Le roman est bien meilleur, d’ailleurs on ne devrait guère faire la comparaison!

5 commentaires:

  1. Assez d'accord avec toi dans l'ensemble, de toute façon un film, même lorsque qu'il est un chef-d'oeuvre du septième art (ce qui n'est ici pas le cas) n'est jamais à la hauteur d'un livre...On peut citer comme exemples Dracula, Le Parrain, Autant en Emporte le vent et bien d'autres films encore...pièces maîtresses du cinéma et pourtant jamais aussi accomplies que le livre dont elles sont issues, tout simplement parce que la littérature n'a pas de restrictions de temps et que ses seules limites sont celles de l'imagination du lecteur!
    Mais le film se laisse regarder, avec un réel intérêt esthétique comme tu l'as souligné. Colin Firth est, comme à son habitude, brillant. Quant à Ben Barnes, je ne serai pas aussi dure que toi. Il faut déjà avouer qu'il a le physique requis pour le rôle, c'est un très beau jeune homme à l'apparence innocente de jeune premier bien poli. Ce point peut être secondaire pour d'autres rôles, pas pour celui-là. Et pour son jeu....pour avoir vu d'autres films avec lui, je dois reconnaitre que, même si il n'est pas à la hauteur de la complexité de Dorian Gray, il progresse et a davantage de présence et de charisme qu'à ses débuts. Il est peu expressif, mais on voit tout de même le personnage évoluer, et des choses se passent dans le regard ; et c'est peut-être mieux d'avoir un jeu plus subtil et suggéré qu'un jeu qui risquerait de tomber dans la caricature si on le rendait plus illustratif. Mais ceci est subjectif, et puis ce n’est pas forcément l’acteur qu’il faut remettre en question ici mais peut-être le réalisateur qui aura souhaité un jeu de ce genre…qui sait ?
    Enfin bref, un film esthétique et agréable à regarder, avec un bel acteur principal et un très bon Lord Wotton…pas inoubliable mais à garder sur son étagère pour les soirées désoeuvrées. 
    Et si on veut des émotions fortes, il y a toujours le livre. ;)

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  2. Je n'ai pas encore lu le livre et pas non plus vu le film. Je ne peux donc pas donner mon avis sur les deux. Mais, je compte bien lire le roman et regarder le film ensuite, pour voir.

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  3. Dommage que tu n'es pas autant aimé le film que le livre... Le roman me tente fort bien (bon le film aussi) et je compte bien les découvrir un de ces jours ! :D

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  4. Je suis tentée par ce livre depuis quelques temps déjà... Ce que tu en dis me donne très envie de m'y plonger...

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  5. J'ai un devoir a rendre sur fe livre et j'avoue que je rame total... Si quelqu'un pouvais repondre a quelques questions se serait génial
    Qui sont les adjuvant justifier
    Qui son les opposant justifier
    Le narrateur ?
    Et presenter dorian gray (age, qualité defaut...)
    Merci d'avance

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