mercredi 30 mars 2011

Cross your heart and hope to die. Quickly!

The crucifix killer de Chris Carter. (La marque du tueur, version française)

Editions Pockets Books 08/2009, 420 pages (Editions en France: First Thriller, 01/2011)


Résumé: "In a derelict cottage in Los Angeles National Forest, a young woman is found savagely murdered. Naked, strung from two wooden posts, the skin has been ripped from her face – while she was alive. On the nape of her neck is carved a strange double-cross: the signature of a psychopath known as the Crucifix Killer.


But that’s not possible. Because, two years ago, the Crucifix Killer was caught and executed. Could this be the work of a copycat killer? Someone who has somehow accessed intricate details of the earlier murders – details that were never made public? Or is Homicide Detective Robert Hunter forced to face the unthinkable? Is the real Crucifix Killer still out there, ready to embark once again on a vicious killing spree, selecting his victims seemingly at random, taunting Hunter with his inability to catch him?

Robert Hunter and his rookie partner are about to enter a nightmare beyond imagining, where there's no such thing as a quick death. "


Mon avis: C’est une première! J’ai enfin lu mon premier thriller en anglais! Depuis le temps que je me promettais de le faire, mais j’étais sans cesse retardé par ma peur d’un niveau trop faible en anglais, mais mon amour pour cette langue a été plus fort et je me suis lancé. Et quelle bonne surprise! Je n’ai pas eu à sortir le dictionnaire pour chaque mot, au contraire, je l’ai lu comme un livre écrit en français. Je ne peux que vous encourager à en faire de même car c’est vraiment une excellente expérience! Et notamment avec ce thriller…


En effet, je n’avais pas connu un tel engouement de lecture depuis ma découverte du brillant auteur américain Richard Montanari! Autant vous dire que l’éloge qui va suivre vous mènera irrémédiablement sur la piste d’un immense coup de cœur!


Tout est bon dans ce thriller: sa structure, son intrigue, ses personnages, sa tension plus que palpable, son écriture. Tout est parfaitement calibré, une danse macabre qui ne laissera pas le lecteur indemne. L’histoire commence d’ailleurs sur un moment d’extrême angoisse où l’odeur d’une mort abominable flotte sans pudeur. Tout est orchestré en fonction de cette scène première et le reste de l’intrigue va se découdre comme une pelote de laine jusqu’à laisser apparaître le cordon final où tout vient s’emboîter à la manière d’un puzzle. Rien n’est laissé au hasard, tout fait signe. Le lecteur est tout bonnement manipulé et la surprise finale est de taille à vous surprendre! Je n’en dévoilerai pas plus car cette histoire de tueur en série machiavélique, somme toute assez banale dans le paysage du polar actuel, offre une perspective nouvelle, une tournure mieux exploitée que la plupart de ses congénères que je vous laisse le plaisir de découvrir.


J’ai beaucoup aimé les deux inspecteurs de ce roman: Robert Hunter et Carlos Garcia. Le premier est un spécialiste des serial killers, doté d’une sorte de sixième sens, autrement dit d’un sens accru de l’observation. Après la perte de son ancien partenaire, une nouvelle recrue vient lui prêter main forte dans l’épineuse affaire du « Crucifix Killer », il s’agit de Garcia, plus jeune et moins expérimenté mais avide d’apprendre les rudiments du métier et de connaître ses moments les plus éprouvants… Peu à peu, ils vont se lier d’amitié et former un couple à la Starsky et Hutch vraiment très plaisant, parfois drôle et émouvant. Une vraie réussite!


L’écriture est très efficace (j’espère qu’il en est de même dans la traduction française) et les pages se tournent sans prévenir. Tout le style de l’auteur est tourné vers des effets d’attente angoissants, des revirements de situations soudains. C’est une écriture dynamique, sans fioritures, qui vous fera passer de délicieux moments de pure montée d’adrénaline!


Chris Carter est un génie du thriller, une magnifique découverte que je ne suis pas prêt de lâcher! J’ai d’ors et déjà commandé le second roman intitulé The executioner! Il me tarde de retrouver Hunter et Garcia!


Un grand et immense coup de cœur! Une nouvelle étoile du thriller est née! Formidable!


P.S: si le souvenir de la langue anglaise n’est pas très loin de vous, n’hésitez surtout pas à privilégier la version originale!

dimanche 13 mars 2011

Aurore boréale sanglante...

Horreur boréale d’ Asa Larsson.


Editions Folio Policier, 02/2011, 390 pages.

Résumé: « Une ferveur religieuse sans précédent s'est emparée de la petite ville minière de Kiruna, en Laponie, depuis que le charismatique Viktor Strandgård, le Pèlerin du Paradis, a survécu à un terrible accident et est revenu d'entre les morts. Pourtant, un matin, il est retrouvé sauvagement assassiné et mutilé dans l'église de la Force originelle où il officiait. Sanna, la fragile soeur de Viktor, demande à son amie d'enfance, Rebecka Martinsson, avocate fiscaliste à Stockholm, de venir la soutenir et l'aider à échapper aux soupçons de la police. Rebecka, aux prises avec son passé et menacée par les disciples de cette communauté religieuse qu'elle a fuie, doit prouver l'innocence de Sanna au nom d'une amitié depuis longtemps brisée... »

Mon avis: Et voici un nouveau thriller venu du nord et qui vient lancer une nouvelle vague d’angoisse dans le milieu du polar pour notre plus grand plaisir. J’ai vraiment chaudement (!) apprécié ce thriller suédois, tout juste sorti en poche et qui, je l’espère, connaîtra un grand succès, d’autant plus qu’il a remporté le prix du roman policier suédois en 2006. En effet, Asa Larsson a un talent certain pour concocter des intrigues plaisantes et une écriture habile qui ne laisse pas de marbre.

Pourtant, ce thriller arbore une facture plutôt familière: un meurtre particulièrement sauvage a lieu dans une petite ville engourdie par les assauts répétés de tempêtes de neige, et une jeune femme intrépide, ici avocate fiscaliste, va tenter de percer le mystère de ce crime rituel. En soi, rien de nouveau sous le pâle soleil nordique, mais la manière dont est racontée l’histoire fait toute la différence, nous avons là un véritable page-turner! L’écriture d’Asa Larsson est envoûtante, on ne peut pas se permettre de poser le livre durant quelques minutes, notre envie sans cesse croissante de connaître le fin mot de l’histoire, le personnage principal toujours plus intéressant, l’intrigue toujours plus sombre … autant d’éléments qui nous poussent dans nos derniers retranchements de lecteurs… lire jusque tard dans la nuit! Et pour un final, ma foi, assez réussi qui satisfait plutôt bien nos attentes.

Concernant le protagoniste, il s’agit d’une femme de caractère, Rebecka Martinsson, avocate fiscaliste à Stockholm, et qui se voit entraîner dans cette sinistre affaire de carnage religieux à cause d’une vieille amitié qui va venir réveiller tous les démons du passé. Le récit est entrecoupé de passages de l’histoire quelque peu chaotique de la jeunesse de Rebecka et nous entraîne avec elle sur les pistes ténébreuses qui la mèneront enfin à découvrir l’identité du meurtrier et de son mobile. Ce personnage est attachant et j’ai vraiment hâte de pouvoir lire sa prochaine enquête comme le promet Asa Larsson dans ses remerciements, une bonne nouvelle.

Un thriller satisfaisant, avec lequel on passe un agréable moment de lecture. Certes pas un coup de cœur, mais une vive recommandation de lecture! Ces nordiques sont décidément passés maître dans l’art du thriller, ou bien le nom Larsson est-il un gage de qualité?!

Je remercie chaleureusement le Club de lecture de Karine ainsi que les éditions Folio pour m’avoir offert cet exemplaire et fait découvrir une écrivain talentueuse que je vais désormais suivre de près!

mercredi 2 mars 2011

Les fantômes du passé... des blessures à panser...

Fille noire, fille blanche de Joyce Carol Oates.


Editions Philippe Rey, 10/2009, 380 pages.

Résumé: « Elles se rencontrent au coeur des années soixante-dix, camarades de chambre dans un collège prestigieux où elles entament leur cursus universitaire. Genna Meade, descendante du fondateur du collège, est la fille d'un couple très «radical chic», riche, vaguement hippie, opposant à la guerre du Vietnam et résolument à la marge. Minette Swift, fille de pasteur, est une boursière afro-américaine venue d'une école communale de Washington. Nourrie de platitudes libérales, refusant l'idée même du privilège et rongée de culpabilité, Genna essaye sans relâche de se faire pardonner son éducation élitiste et se donne pour devoir de protéger Minette du harassement sournois des autres étudiantes. En sa compagne elle voit moins la personne que la figure symbolique d'une fille noire issue d'un milieu modeste et affrontant l'oppression. Et ce, malgré l'attitude singulièrement déplaisante d'une Minette impérieuse, sarcastique et animée d'un certain fanatisme religieux. La seule religion de Genna, c'est la piété bien intentionnée et, au bout du compte inefficace, des radicaux de l'époque. Ce qui la rend aveugle à la réalité jusqu'à la tragédie finale. »

Mon avis: une lecture étrange que je vous présente maintenant. J’ai déjà eu l’occasion de lire un roman de Joyce Carol Oates, que j’avais fortement apprécié, Hudson River, et je dois dire que Fille noire, fille blanche m’a quelque fois laissé de marbre. Mais en même temps, une forte émotion émane de ces pages douloureuses, qui racontent l’histoire d’une jeune étudiante noire dans une faculté américaine élitiste où les fantômes ségrégationnistes refont peu à peu surface. C’est pourquoi je retiendrais notamment cette espace tragique qui occupe le roman et qui m’a largement interpellé, bien plus finalement que l’écriture de l’auteur (que j’ai trouvé pauvre et relativement simple, loin de l’envolée narrative d’Hudson River qui est un enchantement) ou bien que l’intrigue, linéaire, parfois stérile et ennuyeuse. Cependant, il m’a semblé que ce « vide » pouvait permettre de mettre l’accent de manière plus forte sur la douleur et le cri déchirant de souffrance et de solitude qui hantent ce roman.

En effet, deux jeunes filles, une noire (Minette) et une blanche (Genna) vont partager la même chambre dans une université prestigieuse, fière de son passé féministe et antiesclavagiste, qui se veut un modèle d’intégration raciale. L’une est issue d’une famille relativement modeste, fille de pasteur, fortement croyante; et de l’autre, une jeune fille issue d’une riche famille puisque ses ancêtres sont eux-mêmes les fondateurs de cette université! Autant dire qu’un gouffre les sépare, le plus important étant celui de la couleur de peau… Tout le roman fait écho à un passé douloureux, celui de l’esclavage noir ainsi que des manifestations meurtrières de sombres groupuscules comme le Klu Klux Klan qui ébranleront tragiquement, et à jamais, les générations suivantes, dont fait partie Genna. Ce passé, lourd à porter, est toujours présent, profondément ancré dans les racines presque génétiques des Noirs américains. Genna est l’incarnation de cette haine envers les Blancs, bourreaux ancestraux, qui auront ébranlé à tout jamais les mentalités et les conditions des hommes noirs en Amérique. Ce sujet, très délicat, est subtilement représenté par Joyce Carol Oates, qui prend le temps de décrire une jeune fille noire hantée par ses démons, totalement hermétique aux Blancs, antipathique mais compréhensible, même si parfois, elle peut très franchement agacer! Mais au final, un profond sentiment de solitude et de souffrances silencieuses se dégagent de cette personnalité aux apparences inflexibles et dures, et étreignent le lecteur, lui-même impuissant.

Ce roman, c’est celui d’une tragédie, romancée certes, mais criante de vérités qui blessent et qui tortureront à jamais tout un peuple, toute une nation d’hommes et de femmes à la peau sombre, victimes depuis des générations d’un racisme monstrueux qui restera encore et toujours une blessure profonde, incapable de cicatriser.

Un roman d'une qualité mitigée, mais touchant, qui, par sa valeur historique et commémorative et son actualité criante, mérite le coup d’œil.